Les cabinets d’avocats familiaux arrivent un jour ou l’autre à un moment charnière, celui du passage de relais entre la première et la deuxième génération. À ce stade de leur cycle de vie, c’est leur croissance, leur survie ou leur déclin qui sont en jeu. C’est un processus similaire à celui des petites et moyennes entreprises.
Le fondateur du cabinet d’avocats
Le fondateur est habituellement un avocat qui s’est fait un nom et a fidélisé une large clientèle. Cet avocat, au prestige reconnu dans la région ou dans la ou les spécialités où il exerce, ressent une préoccupation bien compréhensible devant ce processus de succession. Ce qu’il souhaite, outre la pérennité du cabinet, c’est le bien-être de son ou ses successeurs, mais aussi du reste de son équipe.
Les cabinets d’avocats familiaux sont souvent centrés autour de la figure principale du partenaire fondateur. Il s’agit généralement d’un avocat qui a exercé son métier dans un esprit avant tout professionnel, sans perspective commerciale particulière.
Le ou les successeurs veulent introduire des changements, mais se heurtent, sauf de rares exceptions, à la résistance du fondateur ou du reste de l’équipe. Cette résistance est souvent le résultat d’inerties opérationnelles qu’il est difficile de vaincre sans tout d’abord les identifier, puis les gérer avec détermination et persévérance.
Le successeur dans le cabinet d’avocats
Dans certains cabinets, le ou les successeurs disent souvent « nous n’avons pas su prendre le relais pour attirer les clients et être sélectifs, et le travail nous arrive par référence ou à travers des connaissances ». Il y a souvent un sentiment de culpabilité. Mais il est inutile de chercher des coupables, car nous faisons tous ce que nous pouvons. Il vaut mieux trouver des solutions et mener le processus de succession avec méthode et détermination, pour garantir la pérennité et la compétitivité du cabinet.
La succession est un processus complexe qui exige de gérer les émotions, les relations, l’inertie, ce que l’on a « toujours fait comme ça » et les jeux de pouvoir présents dans toute organisation.
La gestion commerciale d’un cabinet d’avocats familial
Le point de départ est souvent inquiétant d’un point de vue commercial. Nombreux sont les cabinets d’avocats familiaux où la gestion a manqué de perspective commerciale, ce qui peut se traduire par de nombreux phénomènes, par exemple une absence de direction, de buts et d’objectifs, ou un manque de temps et de ressources pour attirer des clients, c’est-à-dire que le cabinet s’est concentré sur le traitement de ses dossiers et a négligé de chercher de nouveaux cas. On peut également constater une absence de stratégie de marché et de stratégie commerciale, ou encore un manque de communication externe : le cabinet dispose tout au plus d’un site web et de quelques profils au potentiel inexploité sur les réseaux sociaux. Le cabinet véhicule une image désuète, il n’a pas de service phare, ce qui nuit à sa différenciation sur le marché. Il lui manque une politique d’honoraires claire, ou des consultations gratuites sont systématiquement accordées à des personnes qui ne deviennent pas des clients, ce qui entraîne des coûts d’opportunité et des frustrations pour les avocats. Le cabinet peut souffrir d’un manque d’organisation, ou de l’absence d’une politique définie en matière de service à la clientèle. Les nouveaux clients sont attirés par le partenaire principal et non par le cabinet dans son ensemble. La liste continue.
La feuille de route du cabinet d’avocats
Tout cela s’accompagne souvent du fait que le fondateur, habitué à agir en avocat, ne sait pas « quelle stratégie adopter pour entretenir le portefeuille de clients ou pour apprendre à ses successeurs à le faire et à fixer un cap ». Il manque une feuille de route pour offrir une vision et rassurer les autres avocats du cabinet. Quelqu’un a dit « les gens meurent là où il n’y a pas de vision ».
La situation peut être encore plus compliquée si le fondateur est une personne sympathique et généreuse qui « reste engagée dans le cabinet, mais au prix de grands sacrifices personnels et financiers de sa part ».
Il est difficile de changer. Mais cela devient plus facile si nous savons comment mener à bien le processus de changement, comment surmonter la résistance que la plupart d’entre nous y opposent, quand bien même nous savons que les avantages du changement seront supérieurs à ceux de l’inaction.
L’essentiel, ce sont les personnes
Dans ce processus de changement, le rôle du fondateur est fondamental : aider les autres membres du cabinet dans leur développement, être flexible et magnanime, se montrer patient pour obtenir des résultats, faire confiance aux autres, croire qu’il existe d’autres méthodes que la sienne pour atteindre les objectifs.
L’essentiel, ce sont les personnes, et la conviction que nous pouvons réinventer notre cabinet d’avocats.
© Francesc Dominguez, consultant en marketing juridique et en marque personnelle pour les avocats, Espagne, France, Belgique, Suisse, Europe, Amérique latine, États-Unis, www.francescdominguez.com.